L'affichage publicitaire dans la ligne de mire des pouvoirs publics

Depuis hier, les Français sont invités à donner leur avis sur les mesures qu'entend prendre le gouvernement pour "réformer" l'affichage publicitaire. Selon Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, "Cette réglementation va enfin stopper la lente dégradation de nos paysages urbains et périurbains et améliorer notre cadre de vie et l'image même de nos villes". En parallèle, la ville de Paris votait le 11 février dernier un nouveau règlement local de publicité (RLP) avec pour objectif de réduire l'affichage publicitaire de 30% dans les rues, et rétrécir les fameux 4X3 en périphérie. Les villes et les campagnes françaises seraient donc en passe de voir la masse des publicités par affichage diminuer dans les années à venir. Doit-on y voir un nouvel acte de responsabilité commune entre collectivités et professionnels de la com ou simplement un désaveu de plus envers la publicité ? Les annonceurs vont faire la tête...


La réforme de l'affichage, mesure phare du Grenelle de l'environnement

Dans un communiqué, NKM annonce fièrement que "la fin des couloirs publicitaires dans les entrées des villes est en passe de devenir une réalité", soulignant qu'il s'agit là d'un "engagement phare du Grenelle de l'environnement". Le texte est en consultation publique (ici) jusqu'au 11 mars 2011. En résumé, le projet de réglementation prévoit de limiter la publicité extérieure avec la mise en place de nouvelles règles concernant les différents supports de publicité, fixées au niveau national en terme de surface des panneaux, de hauteur, de densité, d’économie d’énergie et de nuisances lumineuses. Le développement de nouveaux procédés et les nouvelles technologies publicitaires, tels que les écrans numériques, sont encadrés afin de mieux anticiper les innovations à venir.

En prime, les communes et intercommunalités pourront également élaborer des règlements locaux de publicité plus restrictifs que le règlement national (soumis au préalable à enquête publique, en associant tous les acteurs à leur élaboration). Nous devrions donc dans les prochains mois voir certains élus zélés entrer dans une surenchère en matière de diminution de la pub, sous réserve qu'ils ne soient pas l'objet de trop de pression de la part de professionnels de la pub ou de commerçants divers...

En clair ça doit changer quoi ? Selon la ministre, "en rase campagne", "il y aura moins d'enseignes redondantes pour dire, toutes les trois minutes, qu'il y a tel ou tel supermarché, garage ou autre à venir". Concernant les entrées de ville, le texte prévoit qu'"un seul dispositif publicitaire est admis pour 80 mètres linéaires de propriété foncière bordant la voie ouverte à la circulation publique"


Pour les anti-pub, c'est "bien, mais pas top".

Le Collectif des déboulonneurs n'est pas totalement satisfait. Selon l'un de ses membres, Nicolas Hervé, la limitation de la redondance constitue le seul "point positif" de ce texte. Pour le reste, l'association juge que le décret est globalement "négatif" dans la mesure où, parallèlement aux mesures prises, il entérine des pratiques qui jusque-là n'étaient pas autorisées, comme la publicité sur les bâches qui recouvrent les bâtiments en rénovation. "Le gouvernement fait clairement le choix de ménager les professionnels", estime l'association dans un communiqué.  Au ministère, on précise que les avis envoyés sur le texte "seront analysés" et que l' "on modifiera éventuellement le décret en fonction de ce qui ressort de cette consultation publique". Je demande à voir...


Paris veut montrer l'exemple

La Mairie de Paris souhaite "remettre en valeur son patrimoine et la qualité de son paysage". Elle estime que "le règlement actuel, adopté il y a 25 ans, très permissif et très complexe, n’est plus adapté aux évolutions de notre Ville et au rapport de nos concitoyens à la publicité". Du coup, un tas de nouvelles dispositions viennent d'être votées :

  • un zonage simplifié supprimant toutes zones de publicité élargie. Paris sera désormais en zone de publicité restreinte ou interdite ;
  • l'interdiction absolue" des panneaux 4x3 (12m2) sur l'ensemble du territoire, ce qui induira la suppression de 920 panneaux essentiellement situés sur le périphérique et aux abords des boulevards  des maréchaux. Leur taille "maximum" a été fixée à 8m2 ;
  • un périmètre d’interdiction de la publicité de 50 mètres autour des entrées principales des établissements scolaires ;
  • une limitation de la publicité lumineuse et de la publicité sur les véhicules ;
  • interdiction de tout dispositif intrusif et de tout dispositif de comptage d’audience.
Ce texte doit être arrêté par le maire de Paris d’ici juillet 2011, après le feu vert de la commission départementale des sites mi-mars, et l'assentiment des élus lors du conseil de Paris de juin. En 2007, le maire de Paris Bertrand Delanoë avait déjà tenté d'appliquer un nouveau RLP. Aussitôt attaqué par les afficheurs, le processus du recommencer à zéro à cause d'un vice de forme...

Cette nouvelle version du RLP, Stéphane Dottelonde, président de l'Union de la publicité extérieure (UPE) regroupant les principaux afficheurs, a voté contre : "D'après nos décomptes, il y aura plutôt 40 à 50% de baisse de la publicité dans Paris, les annonceurs sont très préoccupés", dit-il à l'AFP. Selon lui la mairie de Paris n'a pas mesuré "les conséquences économiques, sociales et financières de ces restrictions" car la ville "perçoit des taxes locales pour la publicité extérieure, des droits de voirie et de redevance".

Quelque chose me dit que le prix du mètre carré d'affichage risque de flamber dans les années à venir...

Sources :
LeMonde.fr, AFP, NouvelObs.com
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